Collectif
des Gammares
collectif qui prend soin du ruisseau Caravelle-Ayagalades !
Focus sur le château Falque
La propriété Falque dit le château du Roi René
Avant que ne s'élève la Cité des Arts de la Rue, aux Aygalades, et même quelques décennies avant, avant que la construction de l'autoroute en 1943 ne modifie complètement le paysage, s'édifiait le château dit du Roi René tel qu'il est sur la photo ci-dessous.
Qui est le Roi René? René d'Anjou ou René 1er d'Anjou dit le bon Roi René est le dernier comte de Provence et de Forcalquier (1434-1480). C'est grâce à l'action de Palamède de Forbin que René d'Anjou devint roi et comte de Provence. C'est lui, également, devenu son conseiller, qui lui céda l'antique Bastide des Aygalades qu'il avait achetée aux Carmes de Marseille. Le roi René en fit donc son lieu de chasse. Il la restaura pour le bien-être que lui apportaient les eaux "thermales"des Aygalades.
A la mort du bon Roi René, plusieurs propriétaires se succèdent. Le 12 septembre 1828, Madame de Marion de Caurraurain et la baronne Jourdan, assistées de leurs maris, vendirent le château du Roi René et domaine des Aygalades, par acte du notaire Barthélemy, à Marseille, à Sieur Limozin qui, 6 ans plus tard le revendra à Jean-Baptiste Falque, entrepreneur et architecte à Marseille. Jean-Baptiste Falque entreprit la restauration de cet ancien pavillon de chasse du roi René.
Au décès de Jean-Baptiste Falque, son fils Louis, avocat au barreau de Marseille fut le fondateur des réjouissances annuelles des ouvriers du livre marseillais. A ces festivités participaient leurs familles dans le parc du XVIIIème restauré.
Les habitants des Aygalades et les familles des grands industriels marseillais, d'origine levantine, les armateurs marseillais, tous étaient conviés par Louis Falque.
C'est la fameuse fête du Gutenberg que reprendra "Les Arts dans la Rue", sur le site de l'Abeille avec les associations des Aygalades... décrit parfaitement par Loïc Magnan, ancien Secrétaire Général de l'Association pour la Cité des Arts de la Rue. Pour des problèmes de succession, le château du Roi René fut mis aux enchères publiques et racheté par ses fils, Jean-Baptiste, Ludovic et Henri.George Sand y séjourna avec Chopin, lors de leurs voyages entre Marseille et les Baléares, où ils furent bien accueillis par Jean-Baptiste Falque, Seigneur des lieux. George Sand et Chopin assistèrent même à des Fêtes populaires splendides en 1843 au château du Roi René. Ces fêtes furent reprises par la suite par Louis Falque sous le nom de fêtes du Gutenberg de 1896 à 1913.
Pourquoi des fêtes dites du Gutenberg? Hans Gensfleisch, dit Gutenberg, naquit vers 1400 à Mayence, d'une famille patricienne aisée dont il est le 3ème enfant. Il doit quitter sa ville natale en 1420 suite aux troubles civils qui agitaient la région. Il y retourne entre 1444 et 1448 et poursuit ses travaux qui le conduiront à la fabrication d'une presse à bras qui lui permet de perfectionner la technique de production de caractères mobiles et emploie l'encre d'impression qui n'est plus à base d'eau. Il est l'inventeur de l'imprimerie typographique, invention majeure de la Renaissance qui révolutionna la production des livres. Des presses du Gutenberg apparaissent alors en orient et en occident. De là, naitra le Gutenberg marseillais financé par Jean-Baptiste Falque. Le projet sera ensuite repris par Louis Falque. Le Journal des Ouvriers du Livre, le Sortier, voit le jour. Il est l'ancêtre du Petit Marseillais et du journal La Marseillaise.
En ces fêtes du Gutenberg, Louis Falque rappela que l'un des premiers rois de Provence d'où est issu le Bon Roi René, était son ancêtre. Charles-Constantin de Provence, dont la mère Anne de Macédoine était la fille de l'Empereur d'Orient Léon VI (866-912), lui-même issu par les femmes des rois d'Arménie et de syrie. Louis Falque rappela également que la mère du Roi René, Yolande d'Aragon-Provence, était de famille royale aragonaise-Castille-Catalane, des premiers Comtes de Provence, d'où le mariage en 1331 de Constance d'Aragon avec Léon IV, roi d'Arménie.En souvenir de la mémoire du bon Roi René, qui avait vu naître l'imprimerie, Jean-Baptiste Falque dénomma les fêtes en son château "Fêtes du Gutemberg".
Pige-la-Vignerte désigné meilleure plume par ses collègues a été désigné pour relater la fête champêtre du Gut du 5 juillet 1896: "Quand arrive Juillet et que Phébus lance sur nous ses innombrables paillettes d'or, on resterait des heures entières à ne faire aucun mouvement de peur de se voir transformer aussitôt en cascade humaine. Les rues de la ville sont de véritables fours et si l'on ne rôtit pas sur place, du moins notre peau prend une teinte qui ne laisse aucun doute sur le genre de chaleur que nous subissons.L'humble mortel rêve alors de sites pittoresques et ombragés, d'un séjour inconnu où il laisserait volontiers couler doucement l'existence à regarder les enfants- qu'il voudrait nombreux- s'ébattre dans les prés verts ou courir après les papillons, de feuille en feuille sans jamais pouvoir les atteindre.Mais, hélas! ce n'est qu'un rêve et l'on doit bientôt en rabattre devant la réalité, la triste réalité, qui nous montre du doigt notre infime condition, laquelle exige que nous mettons un frein à nos plaisirs, sans, pour cela, diminuer nos peines. C'est pour donner l'éphémère illusion de ce rêve, que le Gutenberg organise, chaque année, une fête champêtre dans les environs de Marseille et que les familles de nos membres sont invitées à y prendre part [...]
Le Départ du Gut
Au matin du dimanche, 5 juillet, dès 5 heures et demie, la famille gutenbourgeoise était réunie devant le siège de notre amicale association, attendant l'arrivée des quatre omnibus qui devaient nous conduire au château des Aygalades, mis obligeamment à notre disposition par M. Louis Falque, son sympathique propriétaire.Taglia distribue des rubans bleus, l'insigne de la journée, qu'on attache aussitôt à la boutonnière, vierge encore de toute décoration, malgré nos efforts pour améliorer la langue franco-sortière. Avec le ruban, Alfred donne aussi une chanson, le Gutenberg-Parasol, et, en retour, on lui casque 5 centimes pour couvrir les frais généraux. C'est pour rien.Maillot, armé de son pic, arpente la Canebière à la recherche des omnibus. Peut-être en y allant au devant les fera-t-il venir plus tôt.Voici les retardataires qui s'amènent, il n'est pas difficile de reconnaître parmi eux, le suave Ziopanfilit, dit Ponzio. Laissez-le vous raconter ce qui lui est arrivé:"Figure toi..................................................................................................................................................."Pauvre Ponzio, ces choses là n'arrivent qu'à lui! ...On serre des mains, on embrasse de fraîches joues, afin de blesser le temps -il est inutile de le tuer, car malgré le nombre respectable de gens qui s'amusent à cette opération, il vit toujours- et l'on répète en sourdine l'air de circonstance.Chacun a fait une toilette de circonstance; les hommes coiffés de chapeaux de paille à larges bords; les dames également en chapeaux de paille garnis de ruches et de dentelles, en robes claires, roses, bleues, donnant un air de gaieté à la caravane.Sur le coup de 6 heures, les omnibus font leur apparition; ils sont aussitôt pris d'assaut et l'on part en attaquant le Gutenberg-Parasol, retapé, pour la circonstance, par le camarade Deshenry, alias G.Leboeuf:
C'est le Gutenberg parasol
Qui joyeusement prend son vol
Au château des Aygalades,
Où des ruisseaux en cascades
Le bruit est charmant.
Nous y prendrons de l'agrément,
Garçon, fille, papa, maman,
Et nous chanterons tous en ut, en sol:
Vive le Gutenberg-Parasol
Parasol![...]"
Récit extrait de "Le bon Roi René en Provence" de Bernard Falque de Bezaure
Louis Falque accueillait lui-même en son château avec une grâce et une bonhomie charmantes les joyeux gutenbourgeois et gutenbourgeoises accompagnés de leur tambourin qui lui donnait l'aubade à leur arrivée. Ils arrivaient au château aux alentours de huit heures du matin et ne repartaient qu'une fois la nuit tombée, après concerts, jeux, apéritif, déjeuner, photo, tour de prestidigitation, bal, et farandole dans les jardins, les grottes et les bosquets et auprès de la cascade des Aygalades.
Sensible aux arts et aux lettres, Jean-Baptiste Falque puis ses enfants et petits-enfants accueillent des artistes qui viennent chercher ici les notes et les couleurs. Cette tradition est maintenue même lorsque le parc et les jardins devant le château sont transformés en huilerie-savonnerie l'Abeille Belle Huile et perdure jusqu'à l'expropriation pour la construction de l'autoroute en 1943.
L'architecture de la propriété Falque, racontée par Pige-La-Vignerte, 1896
"Le château des Aygalades que fit construire le bon roi René, garde encore l'aspect des constructions fortifiées du Moyen-Age, grâce aux soins jaloux et au goût exquis de son actuel propriétaire, M. Louis Falque qui, continuant les traditions artistiques de son père, M. J.B. Falque, ancien adjoint au Maire de Marseille, fut assez heureux pour mener à bonne fin sa restauration complète. C'est un petit monument authentique sur lequel les tours angulaires, les mâchicoulis donnent l'impression exacte du XVème siècle, caractérisée par les tourelleset les rinceaux. La tour carrée qui domine la construction et dont les murs sont d'une épaisseur considérable, l'une des tours d'angle qui font face à l'ouest, disent suffisamment, dans leurs lignes architecturales, qu'elles avaient été construites, pour perpétuer, dans ce joli coin de Provence, la mémoire du bon roi provençal. Et c'est avec raison que George Sand a écrit, dans le petit pavillon qui domine la ville, ce quatrain qu'on peut voir aujourd'hui gravé dans le mur:
Le roi René d'Anjou, que bénit la Provence
De ce manoir antique a fait sa résidence
Au bon prince qui fut l'hôte de ces lieux
Je suis heureux d'offrir ce souvenir pieux
Le château des Aygalades, par une donation de Charles VIII, roi de France, passa, en 1489, aux mains de Jacques de Rémézan; en 1532, la seigneurie en fut transférée à Meynier d'Oppède; en 1543, Claire de Meynier en fit la donation à Antoine de Glandèves; en 1599, il fut vendu au président Jean de Lacépède. A partir du XVIIIème siècle, le château appartint successivement à divers propriétaires marseillais qu'il serait oiseux de désigner nominalement, jusqu'en 1834 où il fut acquis par M. Jean-Baptiste Falque, architecte et archéologue éminent, qui en entreprit la restauration complète.
On remarque dans le vestibule du manoir une chaise à porteur que lui légua Jeanne II, reine de Naples, en 1435, à René d'Anjou, son successeur au trône; une armure du Moyen-Age ayant plus de deux mètres de hauteur; divers tableaux anciens, notamment Esther et Assuréus, plus quatre de l'immortel Eugène Delacroix. On voit au premier étage plusieurs meubles ayant appartenu au roi René. [...]
"Dans le parc du château, d'innombrables richesses le sertissent. Cascades, serres, pavillons, ponts, fontaines, statues, motifs artistiques du style Moyen-Age. Ruisseau, bassins, grottes, bosquets de verdure enveloppent les hôtes d'une fraîcheur délicieuse."
L'Huilerie savonnerie l'Abeille Belle huile
image abeille_ok.png (0.3MB)Affiche avec le logo du savon l'Abeille En 1922, s'installe au pied du château l'huilerie-savonnerie l'Abeille Belle huile. Le site comprend une savonnerie, une huilerie, une tonnellerie, un espace d'emballage, un espace d'épuration. Le chenal d'évacuation est encore visible sur le site de la Cité des Arts de la Rue, il plonge dans le ruisseau des Aygalades. Autre trace de la mémoire de cette époque: un tunnel qui reliait l'espace de fabrication avec le bureau du contremaître qui se trouvait à l'entrée du château. Il pouvait ainsi venir à tout vitesse sur le lieu de production en cas de problème. Sûrement que les ouvrierss devaient l'emprunter aussi. Sur le plan du site on peut également observer les stocks de pétrole de la compagnie maritime des pétroles qui s'installe en lieu et place du château de Castellane dès 1917, mitoyen avec le château du Roi René.